Samart et Chian sont installés dans une petite échoppe à Thaphra Chan et font d’excellents Mataba. C’est d’ailleurs le nom de leur petit paradis. Car ici, on cultive l’art de vivre à la thaï, celui du sourire et de la bonne humeur. Sans esbrouffe, dans la simplicité et le dénuement mais avec tous les trésors du monde, la gentillesse et une forme d’hospitalité sans attente de retour. C’est d’ailleurs ce qui nous a attiré, Nong et moi. En vadrouille de fin de journée avant de reprendre le bateau pour rentrer,  nos pas nous ont instinctivement guidées vers ces deux êtres solaires. Comme si cette rencontre était évidente, à peine le regard posé sur leurs délicieuses galettes, Samart m’a proposé de passer de l’autre côté et de venir l’aider. Autant demander à un aveugle s’il veut voir… Mais l’apprentisssage s’est révélé très vite plus compliqué que prévu. Comme quoi, ne s’improvise pas cuisinier qui veut même dans les conditions les plus simples!

Le mataba est une galette de blé au curry dont la farce varie selon les goûts, poulet, boeuf, légumes…Le secret vient du dosage parfait des épices et du piment. C’est la tout le secret. Mais pas seulement : il faut faire une galette suffisamment solide pour supporter la cuisson et les retournements successifs mais aussi suffisamment fine pour qu’elle soit croustillante. Ce qui demande un tour de main que Samart a voulu me transmettre. Hélas, à la seconde boule de pâte transformée en torchon à trous, j’ai rendu mon tablier sous les rires de Chian, heureuse de conserver l’avantage!

Samart nous a raconté que cette échoppe était dans sa famille depuis 3 générations, plus de 80 ans! Mais qu’avec la vie est de plus en plus dure, il n’était pas certain de pouvoir continuer encore longtemps. Il nous a offert un excellent dessert, une sorte de pain perdu au lait de coco posé dans une feuille de bananier. Nous avons dégusté en silence, conscientes que ce cadeau était bien plus qu’un goûter. L’humanité avec tout le sens que peut représenter ce mot quand il est bien porté.